Surveillance : État vs entreprises
« Distinguer la surveillance publique de la surveillance privée est, à mon sens, une grossière erreur. » – Cory Doctorow
« Distinguer la surveillance publique de la surveillance privée est, à mon sens, une grossière erreur. » – Cory Doctorow
Alors que les États-Unis semblent faire marche arrière sur les questions de surveillance massive par la NSA, en France le projet de loi sur le renseignement parait faire le chemin inverse. Depuis la naissance des technologies modernes de communication, la surveillance de ce qui passe dans les tuyaux a toujours butté sur la question de la protection de la vie privée des individus. Un équilibre fragile que logiquement seule la loi doit préserver en définissant clairement qui peut faire quoi, comment et pourquoi. Car une fois que le sentiment de surveillance s’installe, la liberté de chacun s’efface.
Dans les mines de charbon, on a longtemps utilisé des canaris en cage du fait de leur grande sensibilité aux gaz toxiques. Quand l’oiseau s’évanouissait, il était temps de s’inquiéter pour les hommes.
C’est un peu l’idée du Warrant Canary (que l’on pourrait traduire par “garantie du canari”). Cette garantie est une publication régulière, voire automatique, où un prestataire de service indique qu’il n’a pas reçu de demande des agences de renseignements dont il ne pourrait pas parler. Dans le cadre des services en ligne américains, qu’ils n’ont pas reçu de demande de divulguer des informations sur leurs clients hors d’une procédure judiciaire. Si la société reçoit une demande secrète de la justice, elle s’engage à tuer le canari, c’est-à-dire à faire disparaître le fichier canari de son site, informant ainsi qu’elle est sous surveillance, mais sans préciser quoique ce soit, puisqu’elle n’en a pas le droit. Initié par Apple en 2013 – qui a du tuer son canari en 2014 – l’idée a été reprise et développée par l’Electronic Frontier Foundation, le Calyx Institute, l’université de New York et le Berkman Center via un site web dédié (Canary Watch, @warrantcanary) qui surveille l’état de santé des canaris publiés par plusieurs sites (Reddit, Pinterest, Tumblr, Medium… ainsi que plusieurs services de VPN) et se répand petit à petit. First Look Media, l’éditeur de The Intercept, le site d’information fondé par le journaliste Glenn Greenwald à l’origine des révélations d’Edward Snowden, a publié son canari ainsi qu’un petit logiciel (AutoCanary) permettant à qui le souhaite de publier sa garantie canari – un simple fichier texte qui s’ajoute aux métadonnées du site.
Lors de la diffusion de la vidéo « Collateral Murder » par Wikileaks, en 2010, personne n’aurait pu imaginer que 3 ans plus tard on apprendrait que les communications de la planète étaient intégralement surveillées par la NSA. Puis, que la France ferait voter une loi de surveillance de masse d’Internet. Que les lanceurs d’alerte seraient pourchassés par des Etats dits « de droit », comme de vulgaires criminels, (et certains, comme Manning, enfermé pour 35 ans) alors que ce sont ces mêmes lanceurs d’alerte qui dénoncent des crimes d’Etat.
De l’achat du billet d’avion à la fin du voyage, de nombreuses données sont récoltées par les compagnies. Le projet de « PNR français » s’apprête à industrialiser les échanges d’informations avec les autorités.
Le festival Transmediale accueillait à Berlin du 28 janvier au 1er février de nombreux plasticiens et créateurs qui interrogent le rapport que nous entretenons avec les différentes manières dont nous sommes surveillés en ligne.
La NSA. Google. Les opérateurs téléphoniques. Nos banques… Du lever au coucher, on sait depuis quelques années que nos vies se copient en temps presque réel dans des bases de données, parfois sans notre véritable consentement.
A quoi ressemble une vie contemporaine, et donc numérisée ? Dessine-t-elle un portrait fidèle de ce que je suis ? Est-ce même encore possible, en 2014, de le savoir ?
Devant la masse d’articles publiés sur le pseudo scandale PRISM que tout le monde aimerait savoir restreint à la politique américaine en matière de surveillance, il devient de plus en compliqué d’y voir clair. De nombreux médias, assez involontairement, ajoutent du « bruit » là où tout le monde attend un peu de lumière. Aussi modeste soit notre petit média, ce n’est pas l’envie de les secouer un bon coup qui nous manque.
L’après Snowden : la surveillance de masse n’est plus de la science fiction, mais un problème social et politique à résoudre.
A l’occasion de la Journée mondiale contre la censure, Reporters sans frontières publie son rapport « Ennemis d’Internet » mettant en avant les institutions qui sont souvent au centre des systèmes de surveillance ou de censure de nombreux Etats.
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